mardi 27 janvier 2015

Quand le sage montre la lune, l'idiot regarde le doigt ?

Galerie marchande

Nous n'avons pas dans ce blog pour habitude  de réagir à l'immédiat ni à rentrer en polémique. Nous essayons de varier les plaisirs, d'aborder la tauromachie par des transversales un peu culturelles qui nous distraient de la misère stéréotypée des ruedos. On en finirait par préférer les hivers dans les livres aux étés sur la route.

André Viard, on s'en réjouit, reprend la plume après plusieurs semaines d'absence sur « Terres Taurines » et il revient mystérieux dans la rubrique « actualité ». Mystérieux et déçu de on ne sait quoi. On aurait raté une super-carotte. Mais toujours donneur de leçons entre deux sous-entendus où on n'y entend rien.
C'est du style « y'en a qui »... sauf que nous... on ne sait ni « qui » ni « quoi ». Il faut un décodeur ou un détecteur de mensonges, une application qui lise entre les lignes.
Bref, d'entrée ça indispose de savoir que toute la classe va être punie car le prof a les vers.
Et pour finir cette phrase imprévue et lucide « nous devrons nous résigner à être de simples spectateurs de notre décadence. » Propos durs et qui vont surprendre ceux qui croyaient les tauromachies à l'abri depuis l'inscription à la candidature d'inscription à la liste d'attente d'inscription au patrimoine immatériel de l'humanité.

Clic gauche, nous passons à l'édito :
« Mais depuis quelques années les opinions critiques largement diffusées sur les réseaux sociaux ou les médias papiers sont devenues des preuves à charge dans le procès permanent qui nous est fait. Il n'est pas une audience, pas un dossier, qui ne comporte des références aux attaques portées par des aficionados critiques contre les fondements même de la culture taurine. C'est leur droit le plus absolu de les formuler puisque dans notre pays la liberté d'expression est totale. Mais est-ce pour autant la meilleure manière de préserver l'avenir au moment où tous les piliers de la société sont si fissurés qu'il suffirait d'un rien pour qu'ils ne s'écroulent ?  […] l'animal sensible n'est plus une menace, il est une réalité. Et face au danger mortel qu'il représente pour la culture minoritaire qui est la nôtre, l'union de tous est la seule panacée. »

Le prof donne une leçon de communication... à quelques jours d'un gracieux dérapage... manque pas d'air le prof... mais bon... « tout est pardonné » !

Et puis on connait la chanson par cœur : aficionados bouclez-la ! Laissez parler ceux qui savent bordel, comme autrefois, comme au bon vieux temps d'avant le web où nous étions quelques commis aux ordres, des chroniqueurs spécialistes de la fable et du camouflage. Planquons les cadavres sous la moquette juste le temps de la crise qui dure depuis le général Grammont ! Silence dans les rangs ! Vous êtes des cons, unissons-nous !

Mais qui parle ? Le président de l'ONCT, le chroniqueur, le bloggeur ou le marchand de journaux ? On ne sait plus... mais il ressort que l'ONCT finira bien par s'habituer à cette intempestive façon de communiquer. Vient une pensée pour Jean Charles de Bourbon et de Bourbon, grand matador d'éléphants, et à son "¿ Porque no te callas ?".

El Ubano

dimanche 25 janvier 2015

¡ Cinema !

Luis Procuna

L’inconstance n’est pas l’apanage des toreros gitans.
Les mexicains ont également eu leur lot de matadors capables des pires déroutes et des plus grands triomphes, à commencer par Luis Procuna, torero maudit-chéri de Mexico. 
Avant de s’habiller de lumières, il travaillait au marché de  San Juan de Letrán dans le centre de Mexico et il avait une mèche de cheveux blanc sur la tempe droite. On l’appelait donc le "Berrendo de San Juan". 
Le 5 février 1946, il est au cartel inaugural de la Plaza México au côté de Luis Castro “El Soldado” et Manolete face à des toros de San Mateo.

Cette photo (à gauche) prise par Rodriguez a fait le tour du monde. Elle caractérise le toreo de Procuna, par le haut, tout en raideur, et avec de l’aguante… selon les circonstances. En Espagne, il parait qu’on ne l’aimait pas trop. Trop à contre-style. Pas à la mode de l’époque. Au mieux, on le considérait comme exotique.
C’est cette photo qui a servi de modèle pour l’affiche du documentaire « ¡Torero!  » du cinéaste espagnol Carlos Velo.

« ¡Torero!  », c’est l’histoire d’un matador vue par le prisme de la peur. Cette peur qui réclame la despedida et ne permet même pas de profiter d'un fugitif triomphe puisque l'homme sait que, le dimanche suivant, il y aura une autre course qu'il commence déjà à redouter. Pas vraiment un rôle de composition pour Luis Procuna qui disait qu'il y avait trois sortes de peur : la peur du toro, la peur du public, et la peur de la peur. Une véritable confession scénarisée par Hugo Butler (qui n'est autre que le collaborateur, entre autres, de Aldrich, Renoir et Buñuel). 

« ¡Torero!  » a fait couler beaucoup d'encre en son temps (sortie en 1955 et nomination aux Oscars en 1958). Morceaux choisis* :
  • "... Carlos Velo fait le néo-réalisme des hommes qui travaillent le dimanche..." (Cesare Zavattini) 
  • "... Si je n'avais pas vu ¡Torero!, je n'aurais pas fait "La bataille d'Alger"..." (Gillo Pontecorvo)
  • "... Pourquoi ¡Torero! est un film magnifique ? Parce qu'il nous montre, presque sans artifice, la vie d'un matador célèbre qui aime la gloire, l'argent, les hommes et sa famille, mais que la peur oblige à abandonner momentanément sa carrière. Cette carrière cruelle avec qui il renouera, poussé par son orgueil..." (François Truffaut) 

"El Berrendo de San Juan" Luis Procuna et le Dr. Alfonso Gaona


Sur cette autre photo (ci-dessus) prise par les frères Mayo, on voit l’autre facette du déconcertant "Berrendo de San Juan", se jetant à corps perdu dans le callejon après une fuite éperdue face au toro qu’il est censé toréer. C’est le Dr. Alfonso Gaona, empresa de la plaza, qui va lui prêter main forte.

 * Citations allègrement piochées dans le "Cinéma & Tauromachie" de Manuel Rodriguez Blanco.

Zanzibar 

mercredi 21 janvier 2015

Artiste Torero

Faire saigner la peinture - Niki de Saint Phalle - Séance de tir du 15 juin 1961


S’il est vrai que je répugne assez à associer les mots "torero" et "artiste" dans cet ordre, je jubile à chaque fois que peut se faire la combinaison inverse et que s’expose l’œuvre d’un "artiste torero".
Je ne parle pas de Loren et de ses peintures à muleta mais d’artistes de la performance qui voient leur œuvre s’évanouir sitôt qu'ils l'ont conçue et qui, à défaut de risquer leur peau, associent à leurs créations la radicalité de la mort et, par extension, un profond sens de la vie et de tous ses paradoxes.

Prenez Niki de Saint Phalle par exemple. Elle adorait voir ses tableaux saigner et mourir, alors elle les tuait. Pour ça, elle peignait au fusil, avec des balles de peinture, et c’est ainsi qu’elle a tiré sur les hommes, les églises, les pères, son père, la faim, la soif, l’inertie, la saloperie, les présidents. 
Dans d’autres cas, elle construisait dans le seul objectif de détruire. Parce que la destruction est un désir primaire, parce que détruire est nécessaire, et aussi parce que c'est poétique. N’est-elle pas allée jusqu’à réaliser une symbolique fin du monde dans le désert du Nevada ? Niki de Saint Phalle, terroriste artistique.
Quant à ses joviales, géantes et girondes « Nanas », elle ne les a pas fabriquées pour faire joli ni pour amuser les enfants mais pour « écraser les hommes de la manière la plus joyeuse possible » et pour "lutter contre l'esprit scientifique qui nous dévore". Quête inutile et pourtant si essentielle, à l'instar de celle de ceux qui foulent les ruedos et de quelques autres rêveurs...

Niki de Saint Phalle aurait pu être peintre et dessiner des bouquets de fleurs mais elle était plasticienne et torero, envers et contre tous, envers et contre tout. Et tout au long de sa vie d’artiste, elle a mis la jambe et s’est engagée. 
Pourtant, je ne crois pas qu’elle ait jamais « tué » de toros. D'ailleurs, on s'étonne même que ces derniers soient si peu présents dans sa carrière... sans pour autant en être totalement absents. On en trouve notamment dans ses « Accouchements » (dans l’« Accouchement Rose » il est veleto, dans l’« Accouchement Blanc » il est totalement bizco). 

Toutefois, son toro le plus fameux, elle l’a lidié à l'été 1961 : c’était le toro de fuego qu’elle avait confectionné avec son Tinguely de mari pour la corrida dalinienne du 12 août à Figueiras, organisée par Dali himself et en son propre honneur. Au cartel : Curro Girón, Fermín Murillo y Paco Camino face à des toros de Molero Hermanos. Je n’ai pas de photo de ce toro de feu. Elle lui avait farci le ventre de feux d'artifice et il a explosé à la fin de la course.

Si vous allez voir la rétrospective Niki de Saint Phalle au Grand Palais* surtout prenez le temps de regarder les vidéos et vous verrez que je n'exagère pas quand je parle de la grande toreria de cette figura absolument hors du commun.

Zanzibar

* Jusqu’au 5 février prochain

dimanche 18 janvier 2015

Camilo José Cela, écrivain et aficionado, prix Nobel et práctico

Camilo José Cela toreando en Cebreros (Ávila ) - 1943


Camilo José Cela toreando en Las Navas del Marqués (Ávila) - 1948



Luis Miguel Dominguín ofrece el capote a Cela en un tentadero 

en su finca "La Companza" en Quismondo (Toledo) - 1957


Manuscrit de "A bote pronto"

jeudi 15 janvier 2015

Aux choses d'Espagne

La Corrida 

au théâtre Ch. de Rochefort

" La Corrida"     

"Une belle fille, au pays d'Espagne - une certaine Rosita - ne peut se libérer d'une sombre mélancolie. Elle a épousé un homme plus âgé qu'elle parce qu'il était fort riche ; mais elle n'a pas trouvé près de lui le bonheur et elle ne le lui a pas apporté non plus. Les scènes de ménage désolent leurs nuits et sont la fable des alentours... 
Un jeune fermier des environs, Vicente Diaz, courtise la belle Rosita. Son vieil époux en prend tant d'ombrage qu'il se suicide avant même d'être trompé. Mais il a lancé, en mourant, la flèche du Parthe : il a rédigé un étrange testament qu'un étrange notaire a charge d'exécuter. Pour hériter sa fortune, la femme du mort devra épouser immédiatement le jeune Vicente Diaz et devra être heureuse avec lui... 
Hélas! le bonheur ne se commande pas. Rosita, ayant épousé Vicente, continue de se languir d'ennui. Elle essaye en vain de s'en consoler avec un valet de ferme bien râblé. Le spectre du mort la hante. L'appel de l'au-delà est de ceux auxquels on ne résiste point.
Telle est l'aventure tragique aux péripéties de laquelle nous a conviés M. Léon RUTH. Du sang, de la volupté et de la mort : dès qu'on touche aux choses d'Espagne, les sentiments deviennent volontiers farouches... 
En tout cas, Charles de ROCHEFORT, Emile DRAIN, Mary GRANT, animent de leur mieux cette sombre histoire, adroitement présentée par un auteur consciencieux."

 Article de presse de  Jean Michel RENAITEUR


Rosita

Commentaire

Fumeuse histoire taurine quand même, que celle de Rosita  qui a épuisé le vieux riche, le jeune fermier, le "valet de ferme bien râblé", mais se languit toujours d'ennui, pauvre fille. Que le vieux se soit suicidé avant de tuer tout le monde passe encore, que l'auteur de la pièce se nommât  Léon RUTH ne gâche rien, mais ça manque de toros, de vin et de charcuterie. Bref, on n'y croit pas nous non plus. Nous avons fouillé les sites traitant de théâtre, comédie, salles de spectacles... rien.
Nous avons fait une recherche "Rosita" sur Google Images, le résultat est mince. 

El Ubano

lundi 12 janvier 2015

La lettre d'Amélie


« Merci pour votre lettre du 2/10. Pour répondre à votre question, je suis contre la corrida.

La corrida n’a pour moi de sens qu’en tant que métaphore. Je comprends la nécessité d’un combat symbolique entre l’homme et l’animal, cela dit des choses essentielles sur notre espèce et ritualiser cette lutte peut être fondateur.

Mais puisqu’il s’agit d’une métaphore, la mise à mort de l’animal me parait d’une barbarie inacceptable d’autant qu’elle n’est absolument pas nécessaire à cette métaphore. C’est vrai aussi pour toute douleur infligée à cet animal dans le cadre de ce combat symbolique. On ne peut y voir que de la cruauté gratuite.

On m’objectera que parfois c’est l’homme qui est blessé ou tué dans ce combat. Commençons par préciser que je ne souhaite pas davantage de mal à l’homme dans la corrida. Mais quand cela se produirait, ce serait son choix, alors que l’animal, lui, n’a rien choisi. Ce qui fait une sacrée différence.

D’aucuns me diront que la corrida est inenvisageable sans au moins blesser l’animal. Je ne m’y connais pas assez pour le savoir mais si c’est le cas, je ne vois pas comment on peut souhaiter la perpétuation de ce rituel. »

Amélie Nothomb

§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§§
 
Amélie n’aime pas la corrida.

Elle en comprend la nécessité mais elle n’aime pas ça. Pas en vrai du moins. Pas jusqu’au bout. Évidemment pas jusqu’à la mort. Mais même dès avant la mort, elle n’aime pas ça. En fait, Amélie est contre la corrida du début à la fin.

Pourtant, il me semble qu’elle voit les combats de toros d’une manière qui se rapproche dans le fond un peu de la nôtre. La différence, c’est qu’elle les regarde avec la morale, la raison et l’intellect alors que nous on les regarde avec les yeux, le ventre, et le cœur.

Dans sa réponse à ma lettre, Amélie ne m’insulte pas, ne me menace pas. Mieux : elle ne me juge pas. Elle dit juste que la corrida elle est définitivement contre. Elle le dit simplement, fermement, et intelligemment. Une fois n’est pas coutume…

Dans ces conditions, on ne voit pas trop pourquoi les opposants à la corrida n’auraient pas la parole une fois de temps en temps sur Algo de Memoria. Après tout, Amélie ressemble à la moitié des gens qui nous entourent.

Zanzibar

mercredi 7 janvier 2015

Signé Edgard

Corrida espagnole -19- 

Le taureau est trainé hors de l'arène et banderilles de feu








18 août 1901,  jour de la course de taureaux


Ernestine,

Je vous envoie la seule carte de la course de taureaux disponible dans toute la ville de Roubaix : j'ai été au moins dans 15 magasins.


Edgard X

dimanche 4 janvier 2015

Les vieux

"Être aficionado ne signifie pas seulement que l'on aime. On souhaiterait que cela veuille dire aussi que l'on connait. Mais connait-on jamais ce que l'on aime ? On peut toujours se vautrer délicieusement dans les bras de l'illusion  sans jamais trop savoir qui a fait le lit...

Et c'est là que la tauromachie est un profond mystère. Plus on s'en approche et plus elle s'éloigne. Les vieux vous le disent souvent comme à regret, même ceux qui ont vu Manolete, surtout ceux qui ont vu Manolete. Ils vous l'avouent un soir de vieil apéritif ; ils n'y comprennent rien !

Les vieux aficionados ne jugent plus depuis longtemps. Ils sifflent encore moins les pantins de la piste. Et de longue date ne conspuent plus le cravaté délégué aux mouchoirs. Quelquefois même ils oublient d'aller aux arènes. Comme fatigués d'avoir creusé un abîme sans fond, comme exténués par le poids d'un rocher sisyphal, comme si l'autre rive s'éloignait de plus en plus, mirage, désert, brume, encens, crémation d'illusions, fumée de rêves. Les vieux se taisent. Muets de trop d'émotions inexpliquées."


Patrick Espagnet

Extrait de "Les chemins de l'arène"

jeudi 1 janvier 2015

Faisons simple...



Espadas, sobresalientes et espontaneos

Toute l'équipe de ...algo de memoria

Vous souhaite une bien bonne année ! ! !