mardi 26 mai 2015

Un pic, un cap, que dis-je, une péninsule !


6 toros de Valdellan mobiles et encastés, tous applaudis à l'arrastre, pour Paulita, Mehdi Savalli et Cesar Valencia.

 

Sans être effrayants, les 6 Valdellan sont sortis étonnamment grandis et gonflés par rapport à ce qu'ils laissaient apercevoir au corral. Deux d'entre eux ont eu la chance de bénéficier d'un tiers de pique digne de leur condition. Les quatre autres ont été les victimes de piqueros aussi peu scrupuleux que très inventifs.

Après avoir dû avaler 10000* indigestes capotazos, le premier conservera alegria et distraction affirmées du début à la fin de sa vie publique. Paulita fait un excellent travail d'approche par doblones et prend la mesure du toro sur une superbe première série à droite. Châtiment parfait. Après : plus rien. Ou si peu... Castizo accuse la baisse de régime du maestro avant de rallonger sa charge et Paulita poursuit au pico jusqu'à la mort où il s’embrouille à gogo.

Le 4ème titulaire se casse une corne en rematant contre le burladero. On le regrette évidemment, beaucoup... Son remplaçant, Mochuelo, fut à mon goût le moins piquant du lot, noble, plus souvent sur la défensive que sur l’offensive, et de moindre transmission (si on le compare à ses frères) malgré une bravoure avérée à la pique. A la muleta, Paulita dépense beaucoup d'énergie pour un maigre résultat. Entière tombée.

Le deuxième, particulièrement mal piqué, est bourré de qualités qui ne s'accordent pas du tout avec le toreo intranquille de Medhi Savalli. Au deuxième tiers, le torero décide de poser les banderilles et j'ai vivement soutenu ce projet en lui souhaitant du fond du cœur de se mettre en valeur pour l’occasion. Malheureusement, mes prières n'ont manifestement pas été envisagées par Mehdi comme autant d'obligations sacrées. Ou si peu… La faena qui suit est menée à la diable et l’homme se retrouve logiquement noyé sous la charge vive de Mirasuelos qui le trimballe un peu partout dans le ruedo. Et pourtant, dieu que ce toro avait envie d’être toréé ! Entière détournée.

Le cinquième subit un premier tiers encore plus épouvantable que celui évoqué juste avant. En revanche, sur le front des banderilles… il y a égalité parfaite. Compliqué mais racé, ce toro s’est plus ou moins** aimablement prêté à la muleta inopérante de Savalli qui l’achève d’un bajonazo. Puntillé par derrière, Huerfanito aura mérité son ovation au moins autant pour ses qualités que pour avoir été pareillement négligé (© RC). 

Le troisième toro est un brave qui réfléchit beaucoup. L’homme au castoreño (et au physique avantageux) fait très bien son travail lors des trois rencontres (poussées la première et la troisième) et mérite pleinement son ovation. J’insiste sur le fait que cette dernière assertion ne repose aucunement sur le contenu de la parenthèse de la précédente observation. Ou si peu… Cesar Valencia nous fait l’honneur de nous brinder Marmolejo. Obligé au départ de se replacer beaucoup, le vénézuélien finit par contenir les embestidas bouillonnantes du toro sur la corne droite. Il ne réussira jamais vraiment à absorber toute l’énergie de la corne gauche mais, pour un garçon qui a pris l’alternative fin janvier dernier, il est allé beaucoup plus loin que bien des espadas plus aguerris. Une bonne grosse oreille. Bien lourde. Bien vicoise.

Maintenant, le 6. 
A cette heure-ci, sûr que tout a déjà dû être raconté à son sujet, qu'il a un compte Twitter, une page Facebook et que tout le monde le connait mieux que moi. Mais, tant pis, je vais en parler quand même. Juste histoire d’avoir le plaisir de me le remémorer.

Le 6ème de Valdellan s’appelle donc Cubano. Et là où Cubano passe, l’herbe ne repousse pas***. 
Cubano est brave, puissant, sûr de lui, dangereux, et généreux. Il nous a offert un premier tiers qui va nous éviter de nous ennuyer pendant l'hiver. Le moment fut rare et complet : un vrai bon gros puyazo sous une poussée franche, suivi d’un contact prometteur, lui-même suivi d’un autre bon gros puyazo pendant lequel Cubano met à nouveau les reins et puis, et puis, et puis… l’indispensable accumulation de quiproquos qui participent aussi de la légende des grands toros. Au final, la quatrième pique n’a pas été prise bien que le toro l’ait réclamée de son galop fulgurant. Cette œuvre inachevée se termine dans un gros bordel acoustique : musique (c’est elle qui nous a foutu dedans, qu’on se le dise), ovation au toro, ovation au picador Ivan Garcia, hurlements pour renvoyer ce dernier à sa place car le palco n’avait, à juste titre, pas demandé le changement. C’est bien simple, pendant deux ou trois minutes, Vic a pris des allures de Hellfest. Faute de mieux, le palco a fait tomber le mouchoir blanc alors que le piquero arrivait à la porte. Et pendant ce temps-là, les "alguacilettes"…  Bref. Alors que nous étions repus de tant d’émotions et que la cuadrilla nous avait joué un tiers de banderilles à la Tex Avery, il restait à Valencia un petit os à ronger : Cubano, tout frais, tout prêt au combat. Le gamin ne s'est pas décontenancé et a décidé de monter à l’échafaud. Ce fut électrique, courageux, approximatif et poignant. Le torero a camouflé ses carences derrière une résolution sans faille mais, arrivé au cadrage, Cubano, toujours aussi frais, toujours aussi prêt au combat, désarme le matador et le poursuit aux planches. Deux fois. Et puis ce fut l’inévitable voltereta sur un pinchazo porté à la volée. C’est Paulita qui tuera finalement Cubano d’une entière aussi périlleuse que chanceuse. La plaza se noircit de mouchoirs bleus. C’est beau. Vuelta al ruedo pour Cubano et grande ovation pour la cuadrilla au complet en l’absence de Valencia qui sera transporté à l’hôpital. 

Ce n’est pas que Cubano avait eu les yeux partout depuis sa sortie du toril. Ce n’est pas que Cubano avait poussé au cheval. Ce n’est pas que Cubano avait embisté sans relâche. Ce n'est pas que Cubano avait vendu cher sa peau. C’est que Cubano venait de régner pendant 20 minutes sur le royaume de Vic. Pffffff….

Salut du mayoral. Évidemment. 

Zanzibar 

* J’exagère (mais pas tant que ça)
** Plutôt moins quand même
*** Je n’exagère pas

NB : corrida vue avec mes vrais yeux et pas avec ceux du cameraman de Canal + Toros 

1 commentaire:

  1. Et oui Zanzi,tu as tout à fait raison...
    Quel domage...ce toro méritait 5 à 6 piques...
    mais ne boudons pas notre plaisir
    Abrazo
    Cyrille

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