Bernardo del Valle Mora aka Vallito |
Sur les routes sud-ligériennes,
il m’est parfois arrivé de préférer sortir de mon sac une revue taurine un peu
périmée plutôt qu’un bon roman en me disant que si un(e) aficionado(a) passait dans le coin, ce serait un excellent moyen
d’entrer en contact. Une sorte de
message pas subliminal du tout en forme d’invite à la discussion.
Il va sans dire que cet ingénieux stratagème n'a absolument jamais fonctionné.
Il va sans dire que cet ingénieux stratagème n'a absolument jamais fonctionné.
Cette nuit-là, à l’aéroport de
Madrid Barajas, j’avais sorti une revue d’actualité taurine parce c’était ça que j’avais envie de
lire, sans arrière-pensée, peinardement affalée dans un coin d’une cafétéria
sinistre et bondée, en attendant mon vol pour Mexico.
C’est d’abord le bruit de la chaise
qu’on rapprochait de moi que j’ai entendu. J’ai énergiquement ignoré l’importun qui me priait de m’asseoir jusqu’à ce qu’il m’adresse un insistant
et incrédule « ¿ Te
gustan los toros ? ». « Très observateur » me suis-je
dit un brin narquoise, juste avant de réaliser que ma savante tactique venait (bien malencontreusement)
de porter enfin ses fruits. Bonne joueuse, j'accepte la chaise.
L'importun s’appelle Bernardo del
Valle Mota. Autrement connu sous le nom de Vallito. Banderillero de son état. Dans la cuadrilla de Sergio Aguilar himself
le jour de son alternative à Madrid face aux pupilles de Partido de Resina.
On a eu vite fait de dresser une
liste commune de ganaderias : celles
pour lesquelles je me déplacerais volontiers pendant ma prochaine temporada correspondant à peu de chose
près à celles qu’il aimerait autant éviter pendant la sienne. En même temps, il
fait pas trop le bégueule Vallito. Ce qu’il veut, ce sont des dates.
C’est d’ailleurs ça qu’il va
chercher au Mexique. Des dates. Des opportunités. Pour lui et pour le novillero mexicain dont s’occupe son ami Roberto qui partage notre
table désormais nappée de chips au poivron, de bières sans alcool et de bières
avec. Roberto est un peu apoderado. Il
est aussi un peu ganadero et un peu empresa
de quelques placitas dans la région de
Valladolid.
Je les ai écoutés me raconter
toutes sortes d’anecdotes sans trop savoir si elles dataient d’hier ou du
siècle passé. Comme celle de ce novillo
de Los Bayones, le numéro 27, annoncé à « 650 kg approximativement »
car sans le « approximativement », ça aurait été contraire au
règlement ( ! ). Ou encore l’histoire de la cornada flanquée par un toro
mort à un mulillero distrait. Ou
encore ce batacazo avec envol du piquero et de sa monture dans le callejon de je ne sais plus quelle plaza et qu'ils n'ont pas pu me raconter jusqu'au bout tant ce souvenir les faisait encore marrer. Et d’autres aventures que j’ai oubliées, ou pas comprises…
Pour une raison obscure, le novillero de Roberto ne les attend pas à
l’aéroport à l’arrivée. On s’en inquiète un peu, mais pas trop. Bienvenue au Mexique, terre nourricière de l'"ahorita" (forme savante du "maintenant mais pas tout de suite"). On prend les dernières
photos et on se sépare en faisant un cinéma pas possible avec promesses de prochaines
retrouvailles et abrazos à n’en plus
finir.
J’avais rencontré deux figuras de l’ombre. Deux routards de l’afición, un peu roublards, très authentiques, avec le cœur au bon endroit. Le voyage commençait bien.
Zanzibar
Zanzibar
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