Lassés d’être lésés et déconsidérés par les matadors de toros ou de
novillos, Román "El Chato" Guzmán et Saturnino Bolio
"Barana" décident de former un syndicat dédié aux subalternes.
Pendant qu’ils s’échinent à peaufiner leur projet, qu’ils tentent de convaincre les principaux
concernés et qu’ils s’installent Gante 21 Despacho 7, les offenses et brimades
des maestros à leur égard ne cessent de s’aggraver.
Un jour, alors que El Chato
toréait à Ciudad Juarez, un de ses collègues banderillero reçut une grave cornada. Comme il n’y avait pas ni
médecin ni infirmerie dans les arènes, le blessé fut transporté directement à
l’hôpital. Quand il va lui rendre visite le lendemain, son compañero demande à Guzmán d’aller réclamer à son matador les
émoluments qui lui sont dus. Celui-ci file à l’hôtel chercher le matador en
question mais il arrive trop tard. Le « maestro » était parti sans se
préoccuper ni de la santé de son banderillero, ni de lui régler son salaire et
ses frais. Pour faire face à cette situation, le Chato sollicitera la
permission de sortir une couverture à la fin de la corrida suivante afin de
faire appel à la générosité des spectateurs présents. Ainsi a-t-il pu
dédommager un peu le blessé et faciliter le paiement de son voyage retour à
Mexico.
Une autre triste expérience a
pour théâtre Papantla, une ville qu’on ne peut rallier qu’à cheval, en
traversant la sierra. Il n’y a pas encore de route à l’époque. Cette fois
encore, "El Chato" Guzmán est accompagné de Edmundo Zepeda. Au soir
de la deuxième et dernière course qu’ils devaient toréer là-bas, Guzmán et
Zepeda ont pris en charge un de leurs compañeros
blessé et négligemment « oublié » sur place par son matador. Comme
ils n’avaient pas suffisamment d’argent pour rester un jour de plus, ils ont
loué un cheval et ont ainsi entrepris le voyage pour rentrer à Mexico. La
plaisanterie a duré 3 jours, avec pour seules ressources une bouteille d’eau
oxygénée et une d’iode, de la gaze, du coton, un couteau et un crayon dont ils
se sont servi pour enfoncer la gaze dans la blessure pour canaliser
l’hémorragie. En arrivant à Mexico, ils se sont rendus chez le Docteur Francisco
Ortega lequel s’est fait fort de soigner le blessé sans demander un centavo en échange. Ce bon docteur était
connu pour être un bienfaiteur des toreros.
¡Dios lo tenga en la gloria!
C’est comme ça qu’à l’époque les
matadors traitaient leurs subalternes. Et plus il était victime de ces
situations douloureuses et humiliantes, plus l’idée qui obsédait « El
Chato" Guzmán grandissait : il fallait absolument créer un syndicat. Quand ce n’était pas lui la victime, "El
Chato" se trouvait régulièrement contraint de demander l’aumône pour aider
ou soigner un compañero d’infortune…
D’un côté il fallait se soucier d’apporter un soutien économique et moral aux
subalternes qui en avaient besoin, et de l’autre côté il fallait travailler
sans relâche à la constitution de cette association, sachant que c’était une tâche
particulièrement difficile comme l’avaient montré les précédentes tentatives de
regroupement menés par d’autres toreros maltraités et qui se sont toujours
conclues par des échecs. Mais Román "El Chato" Guzmán gardait foi en
son projet et ne cessait de croire qu’il se réaliserait un jour…
(A suivre...)
Zanzibar
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire